Ereutophobie

Présentation de l’ereutophobie

L’ereutophobie désigne la peur de rougir en public, peur assez répandue (10% de la population). Mais comme toute manifestation anxieuse, il y a trouble lorsque les proportions deviennent handicapantes.

L’une des caractéristique essentielle du trouble est le caractère obsédant de la peur : anticipation, évitement, inhibition… Les manifestations anxieuses qui en découlent sont nombreuses. A noter que cette obsession participe elle-même naturellement au rougissement, ce qui entraîne la personne dans un cercle vicieux :

La personne ne tolère pas de rougir est rougit donc fréquemment. A l’inverse, c’est quand la personne tolère le rougissement, que le phénomène s’éteint (ou que les rares rougissements ne constituent plus un problème.

ereutophobie

Le rougissement devient une obsession car :

– Le rougissement est un symptôme d’anxiété sociale apparent : cela se voit, au contraire d’autres manifestations anxieuses (accélération cardiaque, tensions musculaires, maux de ventre, oppression respiratoire…). Un phénomène analogue quoique moindre peut être observé dans certains cas d’anxiété sociale, l’obsession portant sur le tremblement (des mains en particulier) ou la sudation excessive, car là aussi, il s’agit d’un symptôme plus ou moins visible et interprétable par le regard extérieur.

– Le rougissement est incontrôlable et s’aggrave lors des tentatives de contrôle. En voulant contrôler, on augmente encore le niveau d’activation émotionnelle, on lutte… et on rougit encore plus. Le rougissement appartient aux symptômes d’alarme. En voulant contrôler, on pérénnise et développe la dite alarme. Par voie de conséquence, c’est quand on tolère le symptôme, qu’il ne se produit plus.

– Le rougissement est imprévisible. Ajoutant à l’incertitude et au degré d’anxiété, cette imprévisibilité augmente encore la focalisation, l’hypervigilance (même si elles sont illusoires).

– Le rougissement nuit à la performance sociale. Focalisé sur le phénomène interne, on est moins disponible pour l’interaction sociale. On est donc inhibé, moins performant, moins satisfait de ses prestations, ce qui augmente encore la peur du regard et/ou du jugement de l’autre.

– Le rougissement apparait comme une honte à celui qui rougit (dialogue intérieur de dévalorisation, crainte du regard extérieur…). Car ce qui peut sembler étonnant pour un observateur extérieur, le rougissement est vécu comme une honte, une faiblesse terrible (manque de caractère, de virilité…). Là encore, cet aspect ajoute au degré d’anxiété et à la focalisation qui en découle.

Les comportements d’inhibition et d’évitement des situations susceptibles d’être anxiogènes accompagnent généralement le trouble. A noter également ce que l’on nomme évitement subtil (comme par exemple, coupe de cheveux spécifique, fréquentation des salles de sport ou il est normal d’être rouge, maquillages adaptés et opérations chirurgicales visant à supprimer le symptôme).

Représentation schématique du processus cognitif :

Avec l’ereutophobie, on est au centre cognitif de l’anxiété, avec une succession d’interprétations et d’impressions plus ou moins irrationnelles :

1. Supposition que le rougissement est visible
“La tête que je dois avoir!”

2. Supposition que tout le monde voit le rougissement et se focalise dessus
“Ils voient tous que je suis rouge.”

3. Supposition que tout le monde va interpréter négativement ce rougissement
“Rougir, c’est être faible, ridicule…”

4. Supposition que ce jugement négatif va entraîner rejet, moquerie…
“Ils vont se moquer”, “ils vont me rejeter”.

  1. Inhibition, évitement, augmentation du contenu anxiogène de la situation etc… 
    “j’ai trop peur, tout pour éviter ça”!

Remise en cause de l’ereutophobie

L’erreur thérapeutique dans le cadre de l’éreutophobie est souvent de la considérer comme une phobie spécifique, simple dans son processus (comme la peur de l’eau, des araignées etc…)

L’ereutophobie est à considérer comme une phobie complexe, qui prend un double visage : anxiété sociale et assez fréquemment forte dimension obsessionnelle.

A ce titre, les enjeux stratégiques de la thérapie vont être principalement :

  • Intégrer que se libèrer de l’ereutophobie, ça n’est pas ne plus rougir, mais que rougir ne pose plus de problème anxieux (même si le phénomène du rougissement se dissipe pour s’éteindre du fait de la baisse du niveau d’anxiété).
  • Intégrer la nécessité de recadrer le discours centré sur l’obsession « ne pas rougir » vers quelque chose de plus large ayant rapport avec l’anxiété sociale, de manière plus ou moins spécifique.

Jérôme Boutillier, enseignant à l’INCTB.

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